Du Sable. Du sable et encore du sable, s'étendant à perte de vue. Une chaleur étouffante, et un agacement croissant.

Voilà qui résumait l'instant, du point de vue de la Gardienne d'Uxy.

Eirwen voyageait depuis le matin aux côtés de son pégase, à qui la chaleur - jugée excessive du point de vue de la jeune femme - ne plaisait pas plus. L'étalon portait son armure, et ne cessant de renâcler en signe de protestation. Si l'étalon exprimait clairement à sa cavalière qu'il souhaitait retourner dans le climat bien plus supportable des plaines d'Uxy, il suivait néanmoins Eira, allant jusqu'à marcher à ses côtés alors qu'il pourrait voler.

Celle-ci avait cessé de s'occuper des protestations de son camarade depuis un long moment, préoccupée qu'elle l'était avec sa propre envie de faire demi-tour et de tout simplement rentrer à Uxy.

Mais si elle était ici, c'était pour répondre à une demande d'aide envoyée par Nael à Uxy, afin d'aider à l'élimination de Morts-Vivants sévissant dans la région de Cyrodill. Région qui était, bien évidemment, un désert.

Eirwen émit un grondement d'agacement, tout en continuant à avancer sur la route sableuse censée la mener au lieu du rendez-vous de la mission. Une telle chaleur avait le don de l'agacer. Sa part bestiale ainsi éveillée à cause de ses sentiments actuels, la jeune femme d'ordinaire calme était irritable au possible pour le moment.

Mais ignorer cette mission n'avait juste pas été envisageable, pour la jeune femme. Les Morts-Vivants représentaient un danger devant être éliminé. Alors si elle pouvait aider dans cette tâche, elle le ferait.

Eira aurait pu se rendre au fort en volant, mais elle doutait que son partenaire aurait supporté un tel trajet sous cette chaleur en portant son armure, ainsi que le poids de sa cavalière elle-même vêtue de son armure.

Une armure... Quelle idée pour voyager dans un désert...

Mais Eirwen ne savait pas si le dit désert pouvait être fréquenté par des créatures (ou des personnes) peu recommandables à d'autre moments que la nuit, et elle préférait donc rester vêtue de son armure.

La silhouette du Fort de Cyrodill apparu enfin à l'horizon, et la jeune femme lâcha un soupir de soulagement.

- "Aller... Nous y sommes presque."

Ces quelques mots furent soufflés tant à l'attention de son partenaire que pour elle, tandis qu'elle s'efforçait d'accélérer l'allure. La jeune femme n'avait qu'une envie : manger un morceau, et s'écrouler dans un lit... En espérant que l'air dans le fort serait plus supportable que celui respiré actuellement par le duo.

Il fallut encore de longues minutes à Eirwen et Thoran pour parvenir aux portes du fort, où les gardes les arrêtèrent, suspicieux au possible.

S'efforçant d'arborer une expression calme malgré son agacement actuel, la jeune femme présenta l'avis de mission, ainsi que la lettre qu'elle avait reçu, et les gardes la laissèrent enfin pénétrer dans l'enceinte du fort.

Un écuyer vint rapidement afin d'emmener Thoran aux écuries et, chose étonnante de sa part, celui-ci ne broncha pas, et se contenta de suivre le jeune homme en traînant les sabots. Le voyage l'avait manifestement aussi épuisé qu'il avait épuisé sa cavalière.

Eirwen suivit un des gardes jusqu'à la chambre qui lui avait manifestement été attribuée pour son séjour à Cyrodill, et s'y trouva laissée là, sans un mot de la part du garde, qui disparut rapidement à l'angle du couloir.

Interdite, la jeune femme resta planté là pendant un instant. Elle venait vraiment d'être emmenée à sa chambre, sans avoir droit à ne serait-ce qu'un repas ? Elle avait fait tout ce trajet pour venir en aide aux Naelites, et c'est ainsi qu'elle était remerciée ? Certes, elle était arrivée avec un jour d'avance... Mais un repas, était-ce trop demander ?

Si l'air un peu plus supportable du fort avait quelque peu apaisé la jeune femme, son agacement grimpa cependant en flèche suite à ces réflexions.

Si ils pensent que je vais aller me coucher comme un brave toutou, ils se mettent le doigt dans l’œil jusqu'au coude.

De nouveau énervée au possible, la jeune femme utilisa son odorat afin de chercher le garde manger, et son ouïe afin de ne pas se faire surprendre par de probables gardes, tandis qu'elle commençait à marcher dans le fort.

« Hey ! Toi ! Qu’est-ce que tu fiches ici ! C’est interdit ! »

Ce cri résonna soudainement contre les murs en pierre du château, alors que la jeune femme s'engageait dans un autre couloir - quelques minutes plus tard - et elle porta les mains à ses oreilles sensibles afin d'atténuer ce son pour le moins désagréable.

La personne ainsi interpellée par ce cri ne s'arrêta cependant pas à cela, car la jeune femme pu percevoir de nouveau cris de la part du garde, ainsi qu'un bruit de cavalcade.

Relevant enfin le regard en se tenant toujours la tête - ce garde commençait à lui donner un joli mal de crâne, qui n'allait rien arranger à son humeur actuelle - la jeune femme fut témoin de l'entrée plutôt maladroite d'un jeune homme dans une salle, alors qu'un garde le suivait à quelques mètres derrière lui, sans cesser de lui crier de s'arrêter.

Mais il va se taire ?! Il ne voit pas qu'il ne va pas être obéit, de toute façon ?!

Énervée au possible - la fatigue, la chaleur et un mal de tête maintenant bien installé ne faisant pas bon ménage pour la jeune femme - Eirwen s'approcha d'un pas rapide, et parvint à intercepter le garde avant son entrée dans la salle.

Plantée devant la porte ouverte de celle-ci, Eira leva le regard vers l'homme la dépassant d'une bonne vingtaine de centimètres, et ne fit pas mine de bouger lorsqu'il lui lança qu'elle n'avait rien à faire ici.

Montrant ses dents dans un geste purement lupin, la jeune femme grogna - coupant enfin le sifflet au garde - avant de prendre la parole, en laissant complètement de côté son habitude de faire passer sa voix grondante pour une gorge enrouée. Elle était bien trop agacée, et sa part lupine bien trop à fleur de peau, pour faire attention à ce genre de choses.

- "Je ne vais pas y aller pas quatre chemins. Je viens tout droit d'Uxy pour répondre à une demande d'aide de la part de votre pays. Dès que j'ai reçu la lettre de vos supérieur, mon partenaire et moi avons marché pendant plusieurs heures, sous un soleil de plomb, afin d'être ici au plus tôt et ainsi s'organiser." Elle serra les poings, et sa voix se mêla à un grondement, devenant plus rauque encore que sa voix ordinaire. "Et en arrivant, j'ai été laissée devant la porte d'une chambre comme un vulgaire bagage, sans avoir le droit à un quelconque repas ou rafraîchissement. Et comme cerise sur le gâteau, vos cris m'ont donné un mal de crâne dont je n'avais pas du tout besoin. Alors maintenant, je vous prierais de bien vouloir cesser vos cris inutiles et de me laisser accéder à quelque chose que j'estime être le minimum : un simple repas."

Le regard planté dans celui du garde plus grand qu'elle, et un air de défi au visage, Eirwen resta plantée devant l'homme, déterminée à obtenir ce qu'elle voulait.

Un grincement vrilla soudainement les tympans d'Eirwen - arrangeant en rien son mal de crâne - et elle posa les mains sur ses oreilles à nouveau, essayant de diminuer comme elle le pouvait l'écho de ce son strident, qui rebondissait contre les murs.

Les dents serrées tandis que ses tempes pulsaient douloureusement, la jeune femme finit par tourner la tête en direction de celui qui avait fait grincer sa chaise sur le sol en pierre. Si elle sembla clairement agacée contre le jeune homme, qui aidait la personne qui était entré plus tôt dans la pièce à sortir de sous la table, son agacement fut brièvement mit de côté lorsqu'elle se rendit compte de qui il s'agissait.

Le jeune homme aux cheveux blancs - dont elle n'avait pas remarqué la présence auparavant - était un membre de la famille royale de Nael, le prince Zero, si elle se souvenait bien. Elle ne l'avait encore jamais rencontré, mais elle en avait suffisamment entendu parler pour être en mesure de le reconnaître...

Eira gronda doucement, à nouveau agacée, mais contre elle-même, cette fois-ci.

Génial... Quel magnifique spectacle tu viens de donner au fils Impérial...

Si Eirwen avait été un loup, elle se serait plaquée au sol en signe de soumission et de respect. A la place, la jeune femme baissa la tête, afin de ne pas croiser le regard du prince tandis qu'il s'approchait. Croiser son regard aurait été synonyme de défi, chose qu'elle ne souhaitait aucunement.

Agissant purement de façon instinctive, Eira garda la tête basse, sans cesser d'écouter ce qu'il se passait. Elle vit - du coin de l’œil - le garde finir par mettre un genoux à terre suite aux paroles fermes du prince, et Eirwen hésita à faire de même. Cependant, le fils Impérial n'était pas son supérieur à proprement parler. Si elle respectait son autorité en tant que chef d'une "meute" rivale, elle n'avait pas à se prosterner devant lui comme venait de le faire le garde... Du moins, c'est ce que ses instincts lui dictaient.

La voix claire du prince s'éleva une nouvelle fois suite aux excuses du garde, et Eirwen tressaillit : comme tout dirigeant - ou bien dirigeant en devenir - qui se respectait, Zero possédait une voix qui portait plutôt efficacement, sans qu'il n'ait besoin de hausser la voix plus que de raison. Cependant, sa voix résonnait contre les murs en pierre du château, et Eira résista à grand peine à l'envie de se boucher les oreilles une nouvelle fois.

Les explications demandées par le prince furent données par le jeune homme qu'il avait aidé à sortir de sous la table... Sauf que la voix de celui-ci semblait légèrement enfantine, comme si il venait à peine de muer. Était-il seulement sortit de l'adolescence ?

Sans pouvoir l'observer, cela était dur à dire pour Eirwen, mais celle-ci garda la tête basse pour le moment. Elle ne pouvait se permettre de relever le regard tant qu'elle ne se serait pas excusée à son tour pour tout ce grabuge. Et ce, même si le prince avait reconnu, précédemment, que les conditions d'accueil du fort étaient en effet à revoir, comme avaient pu le subir Eirwen et - au vu de ses dires - l'autre voyageur.

- "Ce garde ne faisait effectivement que son travail... Aussi bruyant fut-il dans l'exercice de celui-ci."

Une remarque qu'elle n'avait pu s'empêcher de faire. Sa part lupine était encore bien trop à fleur de peau pour que la jeune femme ait complètement retrouvé son calme, même si elle faisait des efforts.

- "Veuillez m'excuser pour l'emportement dont vous avez été témoin tout à l'heure, Votre Altesse... Je n'avais pas à hausser la voix ainsi... Je ne devrais même pas me trouver ici, à vrai dire. Je n'en ai aucunement reçu l'autorisation."

Ces quelques mots ajoutés, Eirwen ferma les yeux et porta les mains à ses tempes afin de les masser, dans l'espoir d'apaiser son mal de tête.

Contrairement au jeune inconnu fort enthousiaste se trouvant aux côtés du prince, Eira n'avait aucunement l'intention de tenter de négocier quoique ce soit, et elle laissa donc le silence retomber entre eux.

Manifestement, malgré les paroles d’Eirwen visant à essayer de redorer un peu le blason du garde fort bruyant - oui, les cris précédents de celui-ci lui restaient vraiment en travers de la gorge - le prince Naelite ne sembla pas vraiment de son avis, et en remit une couche sur ce garde à l’attitude déjà bien basse. Eira ne pouvant clairement pas démentir les paroles de Zero - qui étaient véridiques - elle ne chercha donc pas à défendre l’homme, et le laissa en reprendre pour son grade.

En même temps, ce n’était pas sa faute, si les gardes du fort avait choisit de les traiter ainsi. La jeune femme n’avait pas vraiment envie de faire l’effort de chercher de nouvelles excuses à ce garde, qui n'avait pas vraiment tenté d'arranger les choses de son côté.

Le fils impérial demanda ensuite à connaître leur identité, mais le jeune homme se trouvant aux côtés du Naelite s’avéra être plus rapide qu’Eirwen.

Cette dernière releva la tête en entendant la présentation de celui-ci.

Oh, il s’agit donc d’un de ces étrangers venant d’un autre monde ?

La jeune femme en avait en effet entendu parler : en tant que Gardienne, il se pourrait qu’elle se retrouve à côtoyer quelques uns de ses étrangers, qui apparaissaient depuis peu tant à Nael qu’Uxy. Personne n’était cependant en mesure d’expliquer les raisons de leur venue ici.

Une certaine curiosité fit son apparition dans son regard, alors qu’elle observait le jeune homme… qui lui semblait trop jeune pour être mêlé à de quelconques combats.

Le dénommé Linfan se présenta ensuite comme un stratège de bataille, et leur demanda quelles étaient leurs armes de prédilection. Lorsqu’il précisa être spécialisé dans la magie noire, Eirwen haussa un sourcil un peu perplexe.

C’est encore un louveteau. Les louveteaux n’ont rien à faire sur un champ de bataille...

Une part d’elle se rebella à la pensée que, le lendemain, ce jeune homme à l’attitude et à l'allure semblant encore un peu enfantine combattrait contre des créatures qui donnaient des frissons à Eirwen, qui en affrontait pourtant plutôt régulièrement depuis leur apparition en ce monde. Se voyant cependant mal lui annoncer cela de but en blanc, la jeune femme se promit de garder un oeil sur ce louveteau fort enthousiaste, le lendemain.

Brisant le silence qui s’était installé suite aux paroles de Linfan, Eirwen prit la parole à son tour, afin de répondre calmement à la demande du fils impérial :

- "Je m’appelle Eirwen, et je fais partie des Gardiens d’Uxy."

La jeune femme ne tenta aucunement de jouer la comédie pour justifier son grain de voix pour le moins... particulier. Après tout, elle ne l’avait pas fait dès le début ; commencer maintenant ne pourrait que paraître suspicieux.

Par ailleurs, elle se permettait de garder la tête haute désormais. En effet, Zero l’ayant mise hors de cause et semblant en plus vouloir détendre l’atmosphère, elle n’avait plus besoin de baisser la tête comme elle le faisait précédemment.

Dirigeant son regard sur Linfan, Eira ajouta ensuite, en réponse à sa question :

- "Pour ma part, je suis un Chevalier Pégase, spécialisé dans le maniement de la lance."

Si se joindre à la conversation l’avait un peu détournée de son mal de tête, la jeune femme dû lutter contre l’envie de porter les mains à ses tempes à nouveau. Elle ne pouvait qu’espérer que sa migraine passerait dans les minutes à venir.